Ruben et Serge Fernandez sont originaires de Tarbes dans le sud-ouest de la France; en 1972 alors qu’ils commencent à bricoler des petits modules de trafics sonores, ils découvrent le monde des synthétiseurs grâce à un Moog et décident de créer leur propre synthé. En Septembre 1975 ils s’installent à Toulouse pour finir leurs études, une licence en informatique ( langage Cobol ) pour Ruben et un IUT de génie électrique pour Serge. Ils construisent tout d’abord des modules sur mesures à la demande de copains musiciens Toulousains. Les Modulaires Série 11 voient le jour en 1976.
Le guitariste français VERTO est un des premiers utlisateurs et participe à l’évolution de la Serie 11 ainsi qu’au design du Kobol version clavier. Ils rencontrent Klaus Schulze qui leur fera découvrir l’EMS synthi, à partir de ce moment la conception et la réalisation avanceront rapidement . Une SARL est créée dont le sigle RSF est constituté des initiales de "Ruben Serge Fernadez" et la production se fait dans un pavillon rue Claire Cazelles à Toulouse. Une vingtaine de systèmes modulaires dont certains parfois monté dans des valises “Samsonite” sont commercialisés ce qui représente environ 300 modules. Un clavier est également conçu dont un modèle portable pour Benoît Widemann (du groupe Magma) modifié spécialement pour piloter aussi son Minimoog. Benoit est également très actif dans le dévelopement des synthés de la marque.

En 1978 naît le KOBOL version clavier dont le design extérieur est en partie conçu par Klaus Blasquiz (chanteur de Magma), les boiseries des premiers modèles sont réalisés par Michel Chavaria des guitares LAG et sont pourvus de boutons gris. Le Kobol tire son nom d’un petit personnage de la mythologie Allemande. RSF se positionne résolument comme un fabricant “haut de gamme” le Kobol très inspiré par le Minimoog est une réussite totale, le son fantastique séduis immédiatement les musiciens professionnels comme Jean Michel Jarre, Kate Bush, Vince Clarke, Bernard Szajner, Vangelis et Peter Gabriel qui viendra l’essayer après un concert donné à Toulouse en 1980. Le kobol dispose d’une fonction très rare sur un synthé, on peut passer progressivement d’une forme d’onde à une autre, du “ morphing” avant l’heure. Des mémoires, un séquenceur, des vco stables et un filtre très musical assurent le succès, mais imposer une nouvelle marque de synthétiseurs est très difficile face aux géants américains et japonais d’autant qu’il y a peu de revendeurs qui distribuent RSF en France pour causes de manque de confiance et de moyens promotionnels. Les ventes sont faibles mais vont prendre de l’ essor avec la série modulaire qui suit.
En 1979 sort la version rack du Kobol : l’expander Kobol qui ne contient que la partie synthèse, la partie mémoire se trouve dans le rack Programmer , apparaît aussi le rack Expander 2 où l’on trouve des modules complémentaires ne figurant pas sur le Kobol, le tout complété par un mixeur 8 voies le KM-8. Les connections de ces modules sont précablées en internes mais désactivées par les patchs externes et donc réellement modulaires cela éveille l’intérêt des écoles de musique et des compositeurs de musiques électroniques. Dans le même temps RSF réalise une console de mixage pour le studio Condorcet à Toulouse, modèle unique et sans suite , TPU 12.

La célébrité vient lorsque Jean Michel Jarre effectue sa tournée en Chine avec un gros système modulaire, il est alors développé un clavier polyphonique le Polyclavier. Le Polyclavier est associé à des systèmes quatre voies polyphonique de Kobol en rack pour faire face à la demande insistante des musiciens qui veulent des Polykobol. Seulement cinq ou six de ces “faux” Polykobol sont fabriqués, sans autotune et sans modulations polyphoniques ils sont assez limités.
En 1981 les deux frères se séparent et montent chacun leur entreprise, Serge crée RSF Sono à Toulouse société de vente de matériel de son et éclairage ou il met au point des pupitres de commandes lumières RSF et Ruben crée RSF SA.Synthétiseurs à Saint Sulpice sur Leze où travaillent dix personnes. Le grand projet est le Polykobol 2, en effet le premier modèle ne sera jamais terminé car adapter les cartes électroniques du Kobol n’était pas faisable il n’existera qu’un prototype 4 voies non fonctionnel et une boiserie.

Sur les conseils de pas mal de musiciens dont Benoît Widemann le projet est repris du début et devient beaucoup plus ambitieux avec des fonctions supplémentaires comme polysequenceur numérique, clavier dynamique , interface K7 intégrée plus de modulations et un arpeggiateur. Malheureusement RSF SA. ne dispose pas assez de moyens financiers pour assumer correctement le développement du Polykobol 2. De plus la complexité de sa conception rend ce synthé très instable (environ 500 composants sont nécessaires dont 3 micro processeur 6809), sa sortie est sans cesse retardée et handicape le développement d’autres produits. Seule la Blackbox va voir le jour dans cette période, mini synthé qui “rend” polyphonique tout synthé mono. La blackbox est en fait très largement inspiré par la Polybox d’EML et se vendra très bien vu son prix raisonnable.

Fin 1982 RSF SA. est en dépôt de bilan et la Société ARIA à Aston en Ariège dirigée par Mr Baumesnil rachète RSF pour 100.000 Francs avec le stock, la moitié du personnel, un prototype de boite à rythme la DD10, Ruben Fernandez devient alors directeur technique et conserve la conception des produits. La motivation de ARIA est de diversifier ses activités et donc souhaite que le département RSF soit très vite rentable. Les premiers Polykobol 2 sont enfin livrés à l’été 1983 après plus d’un an d’attente pour certains clients qui avaient commandé et payé d’avance. Le polysequenceur et le clavier dynamique ne marchent pas et l’instabilité de la machine est catastrophique, malgré un son fabuleux c’est un échec total de plus le prix de 60.000 Francs la réserve à une élite, Yamaha sort en même temps le DX7 pour 15.000 francs, la révolution numérique commence, exit les monstres analogiques.
En 1984 une série de boîtes à rythme numériques programmables sortent des ateliers en premier les DD14 et DD30 aux fonctions et sonorités très réussies puis en 1985 le fleuron de la gamme: la SD140 qui comme la SP12 d’EMU permet le sampling . Il existe un éditeur pour la SD140 sur ATARI qui autorise le stockage et la modification des samples, cette boite est une vraie réussite et possède un son d’une grande qualité. Malgré le succès technologique de ces derniers projets la rentabilité n’est pas au rendez-vous, ARIA stoppe l’activité de RSF et Ruben Fernandez quitte la société en 1987.

RSF est maintenant une marque de légende, ces instruments sont désormais très recherchés pour leurs grandes qualités sonores et la rareté a fait grimper les prix sur le marché de l’ occasion. La gloire est comme souvent posthume!